samedi 27 octobre 2018

Anecdotes sur les personnages et sur les lieux de la famille COTTO

  • Le 17e siècle faste pour les COTTO
Les premiers connus Guillaume et Jullien vers 1608, sous le règne de Henri IV
Les familles sont déjà bien implantées et concluent des mariages avec des membres de la
même fratrie ( Levesque , Josset ). ce qui est un moyen de renforcer la cohésion entre familles de même statut social. 
Guillaume Cotto se marie avec Janne Levesque à Plélan-le-Grand vers 1610.
En 1612 naît un fils, prénommé Jullien, comme son parrain qui doit être aussi son oncle selon la coutume.

Marchand sans doute, on le retrouve installé à Paimpont à partir de 1621. 
Guillaume et Janne auront au moins 5 enfants: Jullien, Janne, Guillaume, Guillemette, Pierre.
La première chose qui frappe à la lecture des plus anciens registres de Plélan, c’est la présence dès les années 1610-1620 de deux signatures distinguées, celles de Guillaume COTHO et celle de Julien COTTO. Ces deux là, apparaissent souvent ensemble.Ils sont donc très probablement frères, ils ont manifestement l’habitude de tenir la plume. 
Quelle profession exercent-ils ? 
Les registres sont muets à ce sujet, mais tout donne à penser que leur métier est très voisin de celui que pratiqueront leurs enfants après eux . Ce qui est sûr, c’est qu’ils ne se situent pas en bas de l’échelle sociale ; un signe parmi d’autres : lors de la naissance de Jullien, fils de Guillaume (avec l’oncle Jullien comme parrain), le recteur rédige l’acte de baptême le 21 septembre 1618 non pas d’une écriture ordinaire mais en beaux caractères gothiques, traitement réservé habituellement aux vrais nobles et aux notables ; c’est la reconnaissance d’un rang au-dessus du commun, sauf à considérer qu’il s’agit, plus prosaïquement, de la simple contrepartie d’une gratification importante versée à l’occasion du baptême, ce qui confirmerait en tout état de cause leur statut de gens aisés.
Les plus anciennes signatures trouvées sont celles de Guillaume en 1612 à la naissance de sa fille Janne et celle de Jullien son frère.

A partir de 1655, on voit souvent cités dans les registres un Jan COTHO et un Jullien COTHO et Guillaume COTTO qui sont régulièrement qualifiés de « maistres » et qui sont de la lignée des Guillaume et/ou Julien du début du siècle (plutôt de Guillaume). Eux aussi ont une signature très élégante, révélatrice d’un bon niveau d’instruction et d’un entraînement au maniement de la plume.
Guillaume est peut-être marchand, comme son fils qui se marie avec Janne Salmon.
En 1630, la foret de Brécelien appartenait en totalité au duc Charles de la Trémouille, pair de France, baron de Vitré. De 1629 à 1642 le duc de la Trémoille, très endetté par sa vie de cours, vend sa forêt en lots, en 1653 la totalité de la foret est vendue à 25 gentils- hommes pour une somme totale de 197.260 livres ( Fonds de Montfort Arch.d'Ille-et-Vilaine, E134) avant d'émigré ruiné,en Allemagne en 1693. .
La vente de la forêt a nécessité un « arpentage » pour circonscrire les lots et leur valeur, on peut penser que les Cotto, arpenteurs ont été requis pour cette tâche, ce qui explique aussi leur présence à Paimpont, qui est de moindre importance que Plélan mais qui connaîtra un développement important avec la création des Forges.

signature de Julien COTHO suivie du sigle de la profession
signature de Charles COTTO suivie de son sigle, Abbé


Les deux communes de Plélan et Paimpont sont séparées par l’étang des Forges et les canaux et la rivière de l'Aff, cette situation proche des courants d'eau favorise la présence d'activités diverses dont les moulins à blé et les moulins à drap, la construction des forges ne va sans aucun doute perturber les activités anciennes installées.
L'histoire des forges de Paimpont, bien que lacunaire , fait mention de conflits d'usage avec les riverains 
Un des nombreux étangs de la commune de Plélan : l'étang de Trécouet , du nom d'un des villages de Plélan , où ont habité mes ancêtres.


Le village du Trecouët à Plélan-le-Grand où se fixe le couple Guillaume Cotto et Janne Salmon.
En lisière de Plélan-le-Grand dans la direction de Saint- Péran, au fond d'une vallée sauvage se niche l'étang de Trecouët qui alimente le Serein.
Ce site se trouve à l’arrière de Franquemont, maison seigneuriale , connue sous le nom de « manoir de Trecouët » qui passe pour avoir été une des résidences du Roi Salomon , roi de Bretagne (9ème siècle)
L’étang est fermé par une digue où se trouve les vestiges d'un moulin en bordure,exploité par un minotier du nom de Texier. Il se peut qu'il ait été utilisé par les tisserands, pour fouler les toiles7.
L'eau est très présente au Trecouët, un étang aux abords marécageux, souvent couvert de brume.
La forêt de Paimpont en limite du village crée un environnement mystérieux et dangereux, propice aux légendes et aventures pour les enfants.
                                     Trecouët ferme près de la rivière

Guillaume COTTO de Trecouët 
C'est mon ancêtre le plus ancien identifiable avec certitude. Il vivra sous la régence de Marie de Médicis et sous Louis XIII et la régence d'Anne d'Autriche.
Il se marie dans les années 1654 avec Janne SALMON. Ils auront 11 enfants.
3 filles et 8 garçons.
Les 3 filles grandissent et se marient :
L’aînée Jane se marie à 17 ans avec Joseph Duault, Thérèse avec Pierre Catherine et Anne avec Pierre Crambert.
Trois fils se marient: Julien à 26 ans avec Anne Tournelier, Raoul à 27 ans avec Janne Breillu
Mathurin le dernier se marie à 21 ans avec Louise Jalu.
Des destins tragiques , pour Pierre qui meurt à 11ans, et Ollivier à 6 ans dont on apprend qu'il est enterré avec un autre enfant de son âge Jean de la Noë. La noyade est possible car les familles habitent près de l'étang du Trecouët.
Jan meurt à 3 ans, un suivant Jean à 5 jours, un Joseph à 3mois une épidémie comme souvent.
Mathurin qui est le dernier né, ne connaîtra pas son père qui meurt à son tour en 1675 à l'âge de 55ans environ.
La mort de Guillaume, le père, apparaît brutale et inattendue alors qu'une nouvelle naissance s'annonce.



Pourquoi, cet homme qui paraît vigoureux et estimé de son entourage meurt-il le 30 septembre 1675 ?

Cette famille au destin quelque peu malheureux présente des atouts. 
Guillaume est marchand «de sa vocation» autrement dit doté des qualités et du talent de sa profession.Cette expression qui apparaît officiellement dans les actes civils renvoyait à une catégorie particulière de tisserands, celui qui achetaient le lin et le chanvre pour vendre leur production, alors que les autres travaillaient « à façon ». et fabriquait la matière première (le laboureur- tisserand)
Il épouse Janne Salmon, de bonne famille, fille d'un trésorier de Maxent, elle a reçu une certaine instruction puisque l'on trouve sa signature dans un acte de baptême, fait suffisamment rarissime à cette époque pour être signalé.
Guillaume et Janne se sont choisis hors du cercle local étroit du village d'appartenance.
La paroisse de Maxent située à quelques kilomètres de Plélan-le-Grand n'est jamais mentionnée auparavant dans les actes de la cohorte Cotto.
Guillaume rencontre Janne au cours de ses transactions à Maxent, où exerce le père de Janne en tant que trésorier. Ils tombent amoureux, se marient et viennent s'installer à Plélan-le-Grand, d'abord à la Jossetaye et très vite au Trécouët.
Leur premier enfant est une fille appelée Jeanne comme sa mère , elle naît le 14 avril 1655.
Les efforts du couple sont concentrés sur leur établissement, Guillaume se déplace beaucoup pour développer son activité commerciale.
Les enfants naissent à un rythme soutenu , presque tous les 2 ans de 1676 à 1667,.
En 1670 meurent Pierre (11ans) Jan (3ans) Jean (5jours) , épidémie ? très certainement, mais peut-être aussi la noyade pour les plus grands.
La disparition des trois garçons est vécue très douloureusement par Guillaume et Janne.
Leur douleur personnelle auxquels s'ajoutent les difficultés économiques vont conduire le couple à la révolte.
La révolte du Papier Timbré a débutée le 3 avril 1675 en Bretagne et le 18 avril à Rennes.
En 1675 Guillaume qui a de nombreux contacts dans les communes environnantes et à Rennes est très tôt averti des demandes légitimes des Rennais, il va s'investir à son tour localement, soutenu par son épouse.
Guillaume , marchand en vue informé parmi les premiers et directement concerné, participe à l’organisation des milices locales.Janne soutient activement son époux. Il se rend à Rennes pour défendre les droits de sa profession et de sa communauté.
Le bureau du papier timbré est mis à sac le 19 juillet à Rennes une dernière fois, ce qui entraîne des morts et des blessés.
Guillaume reçoit une mauvaise blessure mais parvient à rentrer à Plélan-le-Grand, où il va mourir le 30 septembre 1675, Janne mettra au monde leur dernier fils Mathurin 8 mois après son décès.
Il sera enterré en haut de l'église de Plélan-le-grand, ce qui signe son appartenance aux notables locaux, et.... la reconnaissance de ses pairs.
Cet épisode est imaginé mais pas impossible.


Janne, une femme forte, représentative du statut de la femme bretonne.
Famille reconnue, Janne bénéficie d’épithètes tels que honnête, honorable, dame etc ...qui soulignent la position sociale.
Janne aura ses 3 derniers enfants très tardivement entre 43 et 49 ans, ce qui explique sans doute leur faible résistance aux épidémies.
Malgré ses grossesses répétées, on la retrouve à 61ans au mariage de son fils Raoul en bonne forme elle va vivre de nombreuses années après la mort de son époux.
On peut imaginer que cette femme avait un fort caractère et savait conduire ses affaires familiales, notamment pour défendre ses acquis et établir ses enfants. Elle participe à la promotion de son époux en répondant aux sollicitations de son environnement,marraine
d'enfants de plusieurs famille de Plélan , y compris quand ils sont illégitimes.
En 1688, Raoul, le second des fils , semble avoir eu un grand mariage si on en juge par le nombre des présents appartenant aux familles alliées.
En revanche le mariage du dernier fils Mathurin en 1697 est très discret, il fait suite à la mort du père.
Ce sont des enfants chéris par leur mère qui n'a pu garder que trois fils Julien, Raoul et Mathurin et ses trois filles Janne, Anne et Thérèse.
Elle veille à leur éducation et à leur instruction, comme plus tard à celle de ses petits enfants, la plupart sont restés à Plélan-le-Grand. Raoul au Trécouët tandis que Julien part au hameau du Parissel et Anne s'installe au Trégu avec son époux.
Ses filles sont mariées jeunes avant 20 ans, tandis que les garçons dont la majorité nuptiale est fixée à 30 ans, se marient plus tard, après 25 ans, une fois établis en tant que laboureur, excepté Mathurin qui se marie à 21 ans , peu avant la mort de sa mère en 1697.
Aucun des deux premiers ne reprendra le métier de marchand. Ils seront laboureurs, 
Mathurin qui semble avoir hérité de l'entregent de ses parents, très jeune, à 17 ans il est témoin de mariage et parrain.
Il sera quelques temps laboureur, mais dès 1702, il devient marchand.
Il vit dans la maison de sa mère et s'y installe avec sa femme. Comme il est de coutume, le dernier fils héritait des possessions des parents afin de leur assurer leur vieillesse.

Janne ne connaîtra pas Joseph, fils de Mathurin qui naît en février 1698 et qui décédera en 1701 mais il sera remplacé en 1702 par un nouveau petit Joseph.
En 1702 Mathurin devient tixier « de sa profession » ( c'est-à-dire tisserand) et ensuite marchand.


Le statut de Plélan et de ses bourgs:
Les seigneurs tenaient justice au Gué (Plélan) et y entretenaient une prison, en revanche le bourg de Paimpont devient le lieu de l'investissement « industriel ». La commune de développe autour des forges , sous l'impulsion de Jacques de Farcy de Paisnel et François d'Andigné de la Chasse , qui obtiennent en 1653 le droit d'y bâtir des forges , en dérogation aux Édits Royaux qui interdisaient de nouvelles forges, au risque de déboisement massif lié au fonctionnement intensif du haut fourneau.
L’existence et le développement des Forges , entraînèrent de nombreux contentieux entre les propriétaires des forges et les paysans qui bénéficiaient de droits d'usage depuis 1467

  • « Toutes personnes qui veulent avoir leurs bestes en la dicte forest doitvent les escrire deux fois l'an aux officiers de la forest, vendeur ou couterelle et s'en lievent les deniers a tïeux termes de l'an » (Brecilien).
  • « Tout homme qui doibt prandre genetes et joncs en la forets le peult fire en se inscripvant aux diets officiers a chacun des trois paiements de ventes de bois »
  • « Les usagers de Loheac, se ilz sont trouvés explectant о quartier de Haulte Forest, ne aultres endroits que leurs diets ussaiges et s'ils ne soient es escripts de la forest, peuvent estre pris a renezon, ainsi que les aultres non escriptz »

Tixier ou Tessier est la personne qui fabrique les tissues de laine, de lin, de chanvre



  • Les forges de Paimpont

En 1653, Les forges sont vendues à Jacques de Farcy et à François d'Andigné après leur acquisition d'un fief de Brécilien. Le site industriel comprend un haut-founeau et une affinerie de minerai en contrebas de la digue de l'étang fournissant l'énergie hydraulique nécessaire à la fabrication d'ustensiles agricoles et domestiques en fonte et en fer (tôles, marmites, poêles, clous, plaques de cheminées...). Le charbon de bois est obtenu dans la forêt proche auprès des nombreux charbonniers travaillant pour les forges.
Grâce au développement de certains progrès techniques la production augmente. Elle est alors de 500 tonnes de fonte et 360 tonnes de fer. Cette prospérité est due aux commandes pour la guerre d'indépendance des États-Unis d'Amérique.
Le site, outre la constructions de laminoirs à tôle s'enrichit de la construction du logis du Maître de forges et des habitations ouvrières. En 1796, près de 230 personnes y travaillent : jusqu'à 100 ouvriers sur place (métallurgistes, charretiers et ouvriers) et jusqu'à 130 en forêt ( bûcherons et charbonniers, mineurs, gardes forestiers).
L'affinerie des forges de Paimpont servira de modèle pour illustration dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert.



  • Quand nous marions-nous? demande Julien à Anne
Pas un dimanche c'est le jour du seigneur, ni vendredi, jour du jeûne , répond Anne
Nous nous marierons donc un jeudi du mois de novembre, quand toutes les récoles seront terminées décide Julien 

Julien et Anne se marie le jeudi 24 novembre 1682 à Plélan-le-Grand

C'est un beau et grand mariage qui réunit toutes les familles et les voisins.
Tous ont suivis les futurs épousés jusqu'à l'église où les accueille le curé , il a revêtu une belle aube blanche et couvert ses épaules d'une étole de la même couleur, il est accompagné de son clerc.
Il prend la parole sur le parvis de l'église :
« Bonnes gens , nous sommes ici rassemblés pour parfaire le mariage de Julien Cotto et d'Anne Tournelier
Nous avons proclamé en notre sainte église trois bans par trois jour différents. Que s'il y a aucun ou aucune qui sache empêchement par quoi l'un ne puisse avoir l'autre en loi de mariage,le dise sous peine d'excommuniement Le prêtre fait une pause en parcourant l'assistance du regard.
«
Puisqu'il n'y a aucun empêchement, nous prierons tous et supplierons la bonté et majesté de Dieu qu'il Lui plaise de ratifier et avoir pour agréable le saint propos par Lui donné à ces deux futurs époux. »
Tous sont alors priés de rentrer dans l'église
Le prêtre se tourne alors vers le marié et lui demande :
« Quel est ton nom ? »
« On me connaît sous le nom de Julien Cotto. »
Et de même à la mariée qui répond :
« On me connaît sous le nom d'Anne Tournelier»
Le prêtre enchaîne.
« Anne acceptes-tu de prendre librement pour époux Julien?
« Oui. »
«Julien veux-tu vraiment Anne pour épouse ? »
« Oui. »
Alors le prêtre tend les mains vers les époux et leur prend la main droite. Il place la main de Julien dans la main de Anne en disant :
«Anne je te remet Julien comme époux pour que tu le gardes, sain ou malade, et que tu lui conserves ta foi selon les commandements de l'Église. L'acceptes-tu ainsi ? »
« Oui je l'accepte. »
Puis inversant le geste et plaçant la main d'Anne dans celle de Julien, le prêtre dit :
«Julien je te remet Anne comme épouse pour que tu la gardes, saine ou malade, et que tu lui conserves ta foi selon les commandements de l'Église. L'acceptes-tu ainsi ? » :
« Oui je l'accepte.
»
À ce moment le prêtre entoure les mains droites jointes des époux de l'extrémité de son étole en prononçant la formule suivante :
« Puisque vous avez donné pareil consentement à votre union, donnez-vous l'un à l'autre la foi que vous devez à Dieu et à la sainte Église. Gardez-vous mutuellement dans la parfaite fidélité et l'aide mutuelle, selon la règle et le dévouement du mariage. »
Le prêtre retire son étole et les mains se séparent. Il fait signe au clerc qui l'assiste d'apporter l'anneau et il le bénit.
« Créateur et conservateur du genre humain, Toi qui donne la grâce spirituelle et qui fais largesse de la vie éternelle, daigne envoyer ta bénédiction céleste sur cet anneau , œuvre d'un artisan, ta créature ; afin qu'en le portant, l'épouse soit munie de la protection céleste, qu'elle fuie les tentations du démon, qu'elle garde fidélité à son mari, qu'elle instruise ses enfants dans la piété, qu'elle trouve grâce auprès de tous et que par une conduite bonne sainte elle parvienne au salut éternel. »
Après la bénédiction, Anne et Julien s'échange les anneaux,

Les mariés et tout le cortège sortent de l'église, Anne se sauve en pleurant , Julien lui courre après avec toute la famille et les joueurs de cornemuse et force sa femme à entrer dans la maison conjugale. Ainsi le veut la coutume du rapt en Bretagne.
Un grand repas réunit famille et amis, on mange, on boit et on danse longtemps, jusqu'à la tombée de la nuit.
Les mariés sont alors accompagnés jusqu'au seuil de la chambre qui leur est réservée pour leur nuit de noces.
Le lendemain, les amis viennent s'assurer que tout s'est bien passé, et pour prolonger un peu la fête.
Voilà comment a pu se passer le mariage de Julien et Anne à cette époque

  • Petit Pierre va à l'école 
Un beau matin de l'hiver 1751
Petit Pierre a six ans, il va faire la connaissance de son ''régent'' (nom donné à l'instituteur) à Plélan. 
La journée d'école commence à 8h par une courte prière, que les enfants devront connaître par cœur. Ensuite, le régent présente aux enfants les cartons où sont écrites les lettres de l'alphabet, qu'ils répètent ensemble et ensuite les uns après les autres.
Son apprentissage de l'alphabet va continuer pendant un mois, le mois suivant Petit Pierre apprendra les syllabes, pour cela Petit Pierre reçoit un Syllabaire qui sera étudié pendant un mois le troisième mois Petit Pierre ira dans le groupe des Lecteurs il devra savoir lire des mots dans des livres de prières et des commandements de Dieu.
Un silence complet règne dans la classe, les élèves ne s'expriment que lorsqu’ils sont interrogés, le régent parle à voix basse et utilise un petit instrument de bois (le signal) qu'il frappe sur sa table une fois pour commencer la lecture, il frappe 2 fois si l'élève s 'est trompé, il frappera jusqu'à ce que l'écolier ait bien dit le mot. 


  •  Du soin que le maître doit avoir de faire garder un très grand silence dans l'école
"Le silence est un des principaux moyens d’établir et de maintenir l’ordre dans les écoles : c'est pourquoi, chacun des maîtres fera observer exactement le silence dans sa classe, ne souffrant pas qu’aucun parle sans permission.
Pour cet effet, le maître fera concevoir aux écoliers qu’ils doivent garder le silence, non parce qu’il est présent, mais parce que Dieu les voit et que c’est sa sainte volonté."
On aura égard que les écoliers soient placés de telles manière que les maîtres les toujours avoir en vue. Le maître veillera particulièrement sur soi-même pouer ne parler que très rarement et fort bas, si ce n'est qu'il soit nécessaire que tous les écoliers entendent ce qu'il aura à dire.

La classe se termine à 11h30 après une prière, elle reprendra l'après-midi pendant 2h30 et se terminera par une petite messe, qui est l'occasion de dire les prières apprises.
L'école se prolonge au printemps, mais les absences sont fréquentes car les travaux des champs reviennent et les enfants doivent assurer divers travaux, dont le gardiennage des vaches. En été ce sont les moissons qui mobilisent toute la famille.
Petit Pierre retournera à l'école à l'automne de l'année suivante et si il sait bien lire il pourra apprendre à écrire à 7 ans, qui est l'âge de raison.
Mais seuls quelques écoliers étaient admis au rang supérieur des ''écrivains '' et des ''chiffreurs '' (apprentissage de l'arithmétique) car l’Église considérait que l'écriture, la grammaire et l'arithmétique étaient inutiles au salut du chrétien, seuls ceux qui sont vocation à s'élever socialement peuvent en bénéficier, autrement dit les fils de notables, de bourgeois et de gros laboureurs. Les filles n'en parlons pas !!


Le curé inspectait la classe tous les 15 jours, les absences étaient relevées et la morale très surveillée. Les jeux entre filles et garçons étaient strictement interdits. Les « mauvais livres » qui étaient imprimés en Hollande, et qui circulaient sous le manteau étaient très surveillés.
A la fin de sa scolarité, arrivé à 14 ans à l'âge de sa Communion, Petit Pierre connaissait par cœur toutes ses prières, pour adorer Dieu du lever au coucher du soleil. Il savait sanctifier un repas en récitant le bénédicité et les grâces, dire son chapelet pendant la messe....bref il maîtrisait toute la liturgie de base en lisant dans son missel.
Cet apprentissage terminé, Petit Pierre est un jeune adulte.
Mais le contrôle social et religieux ne se relâche pas, au contraire.
Les jeunes gens et jeunes filles étaient étroitement surveillés, par le père , le curé, la famille : le jeune adulte, qu'il soit garçon ou fille, devait rester chaste jusqu'à sa majorité nuptiale.
Cette prescription avait un but de contraception, afin de limiter les naissances, bien sûr il y avait des entorses,mais elles étaient relativement rares,pour la grande majorité,les mariages des garçons sont tardifs.
La "promesse de mariage" était un engagement ferme à épouser celle avec laquelle on avait eu des libertés amoureuses avant le mariage.Le mariage avait lieu dans les plus bref délais, avant la naissance de l'enfant. En cas de non respect de cet engagement annoncé par le curé,un procès était engagé par le jeune fille.
Les charges familiales devaient être limitées, les fils célibataires travaillaient pour le père, les filles étaient placées dans des familles plus aisées dès 10/12ans.Un mariage pouvait être une nouvelle charge.


Petit Pierre a respecté les prescriptions sociales. Il a 37 ans quand il épouse Jeanne qui à 30 ans et ils n'auront que 4 enfants.









vendredi 26 octobre 2018

Anecdotes sur les personnages et sur les lieux de la famille Depras



  • Jean-Pierre Depras, fondateur de l'entreprise familiale de rubanerie
Quel parcours pour Jean-Pierre Depras ? Il est possible de l'imaginer. 

En 1747, la communauté des passementiers est la plus riche et malgré les aléas de la mode et de la politique elle le restera jusqu'à la fin du 19ème siècle.
Jean-Pierre est placé en apprentissage chez un tisserand de Monistrol, ami et allié de la famille pour apprendre les techniques de tissage.
Après 4 années obligatoires d'apprentissage, il part à Saint-Didier-la-Séauve qui est de loin le plus important centre de fabrication pour les passements de luxe, et pour les tissus ornés d'or et d'argent.
Il est accueilli par une de ses tantes Jeanne Pichon mariée à André Brun, qui habite à Saint-Didier. Leur fils André est passementier. Pendant plusieurs années,Jean- Pierre reste célibataire, il va nouer des relations avec les passementiers qui sont en nombre important. Plus de la moité de la population active est investie dans la production rubanière, cependant il n'y a pas de gros négociants à Saint-Didier.
Malgré les aléas de la Révolution, l'industrie du ruban a repris son activité dès 1790.
À 35 ans Jean-Pierre épouse Catherine Boutéon (25 ans) qui est rubanière, son père est maître serrurier et la famille semble bien installée dans la ville. Mais là aussi la passementerie apparaît plus porteuse d'avenir.Tous les enfants Bouthéon sont passementiers .Tous les témoins du mariage de Jean-Pierre et Catherine sont passementiers dont Charles, frère de Catherine.

Ce mariage renforce l'intégration dans le milieu des rubaniers et des passementiers dans une période de fort développement de l'activité rubanière.



JEAN-PIERRE Depras (1767-1835) mariage 7 floréal An 10 (27 avril 1802)


CATHERINE Bouthéon ou Boutéon( 1777-1816)


Les enfants et leur histoire
Jacques 1805
Marguerite
1806
Eustache
1808
Marie
1809
Mathieu
1811
Marie Magdeleine
1813

Leur premier enfant, Jacques, est né en 1805, relativement tardivement après leur mariage, Jean-Pierre a 38 ans , 5 autres enfants vont naître entre 1806 et 1813.

Mathieu décède à 4 ans.
La famille habite Faubourg de Lyon et si on en juge par les témoins de naissance des enfants, elle évolue dans un cercle de marchands , propriétaires, négociants.
En 1816 à 39 ans Catherine décède. Jean-Pierre reste seul avec ses 6 enfants qu'il va élever seul, Marie-Magdeleine, la plus jeune a 3ans à la mort de sa mère.
Catherine laisse un petit héritage à son époux dont un « immeuble » et du mobilier pour une valeur de 1250 francs de l'époque, ce qui n'est pas négligeable.


La famille semble bien prospérer, dans une période de production intensive, grâce à l'invention du métier Jacquard (1828). Les spécialités apparaissent: veloutier, caoutchoutier… les hiérarchies professionnelles se développent. 
Dans le centre urbain de Saint-Étienne le commerce est mené par le négociant et le commis de barre, tandis que le passementier reste localisé dans les communes de la Haute-Loire.
A Saint-Didier « aucun passementier ne s'établit fabricant à cause des difficultés de communication et l'inertie d'une riche bourgeoisie qui s'isolait ne songeant point à associer ses capitaux à un négoce qui devait apporter la richesse à Lyon et à Saint-Étienne » selon Chausse dans son livre la rubanerie de Saint-Didier.


Le premier, Jacques, et le second, Eustache, sont nés à Saint-Didier sous des auspices très favorables, ils ont pour témoins de naissance un noble local très estimé : Henry Saignard de La Fressange, et des notables tels Simon Grasset et les Riou...
La France est toute dévouée à Napoléon qui gagne toutes les batailles qu'il engage.


En 1808, Saint-Étienne obtient la création d'une Condition des Soies placée sous administration municipale, et échappe à la domination de Lyon.
L'activité rubanière offre à la ville le cadre économique nécessaire au développement des industries stéphanoises.

En 1834 alors que la Fabrique Lyonnaise amorce la délocalisation de sa fabrication dans les zones rurales, les passementiers stéphanois représentent déjà plus de 80 % des rubaniers de la région lyonnaise.

En 1846, les fabricants de rubans siègent au conseil municipal, jusqu'à 40 000 personnes vivent de la passementerie. 
Saint-Étienne va déposséder Lyon, l'éternelle rivale, du titre de première ville ouvrière de France.




Jacques et Eustache vont quitter Saint- Didier pour s’installer à Saint-Étienne.
L'un, Jacques, sera veloutier et échantillonneur, l'autre, Eustache sera passementier et ensuite négociant.
Quant aux filles Depras rubanières , elles épousent des rubaniers excepté Madeleine qui se marie avec un cordonnier.
Selon la légende familiale il y aurait eu un Depras consul ou préfet, nommé sous Napoléon mais à ce jour je n'en ai trouvé aucune trace.









  • Histoire particulière de Saint-Didier-la-Séauve

Saint-Didier-la-Séauve embrasse tour à tour, le parti des protestants et des catholiques.
Elle fut assiégée et pillée, en 1562 par le Baron des Adrets; en 1570 par l'Amiral de Coligny; en 1584 par le Duc de Nemours. En 1589, le Roi Henri IV envoie une lettres aux consuls à l'occasion de l'assassinat de Henri III .
En 1591, le Duc de Mayenne met le siège devant la ville qui se rend, la garnison sort avec les honneurs de la guerre.
Vainqueur à Arnay-le-Duc, en 1570, l'amiral de Coligny signa avec Charles IX la paix de Saint-Germain-en-Laye.

Huit ans après, Saint-Didier n'avait pas encore réparé ses maux quand il eut à subir une nouvelle attaque et une nouvelle spoliation de la part des troupes de l'amiral de Coligny.

Le 12 mai 1570, ce chef huguenot, parti d'Aubenas pour Saint-Étienne, passa par La Mastre, Rozières, Palharès, Rochepaule, Montfaucon, Dunières. Il occupa Saint-Didier et y mit une garnison.

Des escarmouches entre les soldats du duc de Joyeuse et ceux du duc de Montmorency eurent lieu dans les environs, en 1575.

Ces petites rencontres se poursuivirent même jusqu'à Bourg-Argental et Saint-Sauveur-en-Forez. Le 5 février, notamment, quelques habitants d'Annonay surprirent la maison de la Rivoire, appartenant à la dame de Lupé, près de Bourg-Argental.
Les habitants de Saint-Didier ont embrassé la cause d’Henri de Navarre, chef des protestants.
Le duc de Nemours, chef des Ligueurs, vint les assiéger, en 1584. Saint-Didier fut pris et pillé.
Malgré la petite garnison qui y fut laissée en observation, Saint-Didier se fit remarquer par son attachement à la cause royale et par le regret que ses habitants exprimèrent à la mort d’Henri III, le 1er août 1589.

C'est en raison de ces sentiments et en témoignage de reconnaissance que Henri IV fit parvenir aux consuls, à ces bons royalistes une lettre close, revêtue des cachets, pour les féliciter de leur fidélité à la cause royale.


Cette lettre du roi Henri IV soutint, pendant quelque temps, la courageuse persévérance des habitants de Saint-Didier.

A peiné Henri III avait-il succombé, frappé par le poignard d'un « religieux Jacobin de Paris, de la part de Dieu envoié, de l'age de 22 ans, nommé frère Jacques Clément, après avoir chanté et célébré messe et faict prier pour luy les autres religieux de son couvent » que son successeur, Henri de Navarre, qu'il avait lui-même désigné en mourant, écrivit à ses biens chers et bien aimés les Consuls et habitants de la ville de Saint-Didier, où Christophe Motier de Lafayette, commandait une garnison royaliste de vingt-six gens de pied, la lettre suivante : A nos chers et bien aimés les Consuls et habitans de notre ville de Saint-Didier.
 Chers et bien amés,
De par le Roy, chers et bien aimés, la rage et la cruauté des ennemis du Roy et de cet Estat les a poulsés si avant, que d'avoir faict entreprendre malheureusement sur sa vie, par un Jacobin, introduit de bonne foy, pour la révérence de son habit, à luy parler en sa chambre, hier matin, où il lui avoit donné un coup de couteau dans le ventre, qui ne montroit apparence de danger au premier appareil ny tout le long de la journée.  Néanmoins, il a rendu l'âme à Dieu, cette nuit, laissant à ses bons serviteurs, qui sont icy en extrême ennuy et un grand déplaisir, tous bien résolus avec nous d'en poursuivre la justice; à quoy, de nostre part, nous n'épargnerons jusques à la dernière goutte de nostre sang, puisqu'il a plu à Dieu nous appeler en son lieu et en la succession de ceste couronne, ayant bien délibéré aussy de donner tout le meilleur ordre que faire se pourra avec le bon conseil et, advis des princes et autres principaux seigneurs de l'Estat, à ce que sera de bien et conservation de l'Estat, ne y rien innover au faict de la religion catholique, apostolique et romaine, la conserver de nostre pouvoir comme nous en ferons plus particulière et expresse déclaration, et ne ferons aussi en ce qui concerne l'Estat aucune chose qui ne soit « trouvée bonne pour le bien du public. Sur quoy, nous avons bien voulu escrire la présent lettre, pour vous assurer de nostre bonne intention, à ce que vous soyez d'autant plus confortés à persévérer en la fidélité que vous avez par cy-devant gardée à votre Roy, vous assurant que ce faisant, vous recevrez de nous, tout le meilleur traitement et soulagement, en ce qui concernera vostre particulier qui nous sera possible.
Sur ce, nous prions Dieu, chers et bien amés, vous avoir en sa sainte garde.
Ecrit au camp de Saint-Cloud, le 2em jour d'aoust 1589.
Signé : HENRI. »
Et plus bas : Revol.


Voici une autre lettre du roi Henri IV à César de Saignard, commandant d'une compagnie de 200 hommes, par commission du 4 avril 1590.

A notre cher et bien amé César de Saignard, salut. Ayant délibéré de mettre sus à faire promptement lever cet assembler bon nombre de gens de guerre tant de cheval que de pied, pour nous en servir es-occasions qui se présenteront pour la conservation de notre Etat et de nos bons sujets, et d'en bailler la charge à quelques vaillants et exilérimentés capitaines à nous fidèles et assurés ; à cette cause, lesdites qualités être en vous, vous avons commis et député, commettons et députons par ces présentes, signées de notre main, pour lever, mettre Sus et assembler incontinant et le c plus diligemment que faire se pourra le nombre de deux cents hommes de guerre à pied français, des meilleurs et des plus aguerris soldats que pourrez choisir ; et iceux mener et conduire à la guerre avec vous, sans désemparer ladite « compagnie, sous la charge de notre cher et très amé cousin le duc d'Epernon, l'un des pairs de France et colonel général de notre infanterie française, la part où il sera par nous ou nos lieutenants généraux ordonné et commandé pour notre service, faisant iceux vivre avec telle police, qu'il ne nous en vienne aucune plainte. De ce faire, nous avons donné et donnons plein pouvoir, autorité, commission et mandement à tous qu'il appartiendra, qu'à vous ce faisant, ils obéissent ; car tel est notre bon plaisir. Donné à Corbeil, le 4em jour d'avril, l'an de grâce 1590, et de notre règne le premier.
Signé : HENRI.
Par le roi : signé SUZE.

Au mois d'août 1590, le baron de Saint-Vidal, gouverneur du Velay, résolut de réduire ce petit foyer de résistance protestante.
Au nom de la Ligue, il somma la ville de Saint-Didier d'ouvrir ses portes, à peine d'être traitée comme le château d'Espally, dont on venait de faire sauter toutes les voûtes, au moyen de quatre charges de poudre.
Les Consuls de la ville répondirent qu'ils se rendraient, à condition que de Saint-Vidal et les siens consentissent à reconnaître de Montmorency comme gouverneur général.
Cette condition fut acceptée et Saint-Didier reçut une garnison de Ligueurs, pour peu de temps, croyons-nous.
Cependant, les habitants de la ville faisaient, de temps à autre, des retours vers le parti du Béarnais. Cette attitude ne manqua pas d'inquiéter les chefs catholiques.
En 1501, le duc de Nemours, frère utérin de Mayenne, À qui le duc de Mayenne avait donné le gouvernement du Lyonnais, entra dans le Velay, à la tête d'un corps considérable de troupes. Sur le bruit de son arrivée, la garnison d’Yssingeaux évacua cette ville, qui se soumit à lui. Celle de Monistrol en fit autant.
La garnison de Saint-Didier refusa de se rendre et le siège commençât.
 Mais voyant que les Ligueurs se disposaient à battre la place avec le canon, la garnison capitula et obtint l'insigne honneur de sortir « enseigne déployée et mèche éteinte »
Saint-Didier fit comme Montfaucon. De royaliste, il devint « nemouriste ». Le duc n'en prescrivit pas moins le démantèlement de la place.
Le chevalier du Puy Saint-Martin, de la maison d'Urre, en Dauphiné, fut chargé, par le duc de Nemours, qui lui écrivit de Brioude, de presser le démantèlement (4;.
Un procès-verbal du siège de Saint-Didier par le duc de Nemours a été dûment établi. Voici un extrait de ce curieux document :

 L'an 1591 et le 15 février avant midy, Me Didier Jabrin, notaire royal en ladite ville, prins pour escribe en la présente procédure.
 A l'occasion du passage de l'armée du seigneur duc de Nemours, l'hors qu'il mit le siège devant la ville de Saint-Didier, auquel temps, il se logea lui-même et tout son train dans le monastère de la Séauve, avec plusieurs seigneurs et gentilshommes qui l'accompagnaient où la dicte Dame et le dict monastère reçurent une grande dessime, foulte et despens et tout le voisinage aussi, de tant cestoit par moissons et que la dicte armée fist séjour du dict siège, de sept à, huit jours, passés lesquels la dicte Ville se rendit au dict seigneur de Nemours, laquelle fut après pillée et sauvagée.
En quoy, le dict monastère reçut de grandes incommodités; pour estre proche de la dicte ville, et attendu que le dict seigneur de Nemours y laissa une forte garnison tant de cheval que de pied, qui faisoit, de jour à autre, mille injures au pauvre peuple, notamment, aux sujests du dia monastère, entre autres au granger d'iceluy qu'y tint à louage une des chevances au dict monastère, proche du lieu de la Séaulve, auquel granger, ceux de la dicte garnison, battirent partie de sa récolte et après emportèrent le grain qui en provingt, de façon que n'est moïen de satisfaire à son louage, au grand préjudice de la dicte Dame Abbesse d'ailleurs ; et qui pire fut, l'hors qu'on procédoit à la remise des murailles de la dicte ville de Saint-Didier, laquelle le dict seigneur de Nemours avait fait démanteler le dict monastère de la -Séaulve fut pétardé et sur le point d'estre surprins par ceux de la garnison de Monistrol et autres garnisons ramassées et assemblées à cest effaict es nombre de quatre à cinq cens armes, à, la poursuite du sieur de Champetières, commandant au dict monastère, qui vouloit establir au dict monastère une garnison de gens de cheval de Gascons, afin de faire guerre plus forte au dict pays, et empêcher, comme il disoit, les fortifications du dict Saint-Didier.
Ont signé :
Antoine du Fornel, lieutenant général; Antoine Gontant, notaire royal, demeurant à la Séaulve ; Benoist Guillaume ; Jacques Fournier et Estienne Pichon, prestres ; noble Marcelin Bayle, sieur de Villeneuve de Chantemerle ; Jean de Guillomon ; Bonnet Cellarier ; Antoine Vedelly ; Claude Coppier, docteur es droits ; M. Loys Faure, procureur d'office ; Victor Gravil ; Blaise Vatallier, Claude Pichon,
Jehan Planchette, notaires royaux ; honnestes Jean Pichon ; Antoine Laurenson ; François Granillon et Benoît Laurenson, marchands; tous habitants de la ville de Saint-Didier.

Par une lettre datée du camp devant Saint-Didier, le 23 août 1591, Charles de Savoie, duc de Nemours, avait confié à. Guillaume de Chabannes, de Monistrol, maître de camp d'un régiment de gens de pied, la garde du château de Montregard, pour le maintenir sous son autorité, dans le parti de la Sainte Union.
De Chabannes ne mit aucun retard à accomplir sa mission. Au commencement de l'année 1594, Saint-Didier se soumit à Henri IV.
Le 30 octobre 1594, un état des frais d'entretien des garnisons fut dressé par le greffier des Etats du Velay.
Le roi écrivit une seconde lettre aux Consuls et aux habitants de Saint-Didier pour les féliciter d'avoir résisté au duc de Nemours. Malheureusement; les chroniqueurs vellaviens n'ont pas conservé cette lettre royale, qui eût dû rester dans les archives de la ville, comme un témoignage de reconnaissance.
Après avoir conquis Saint-Didier, le 26 août 1591, le duc de Nemours, à la tête d'une puissante armée, fit son entrée solennelle au Puy.
A cette époque, la garnison de Saint-Didier était composée de 56 hommes de guerre, tandis que celle du bourg de Polignac, 50 gens de pied et 37 gens de cheval. Le château en avait également 50. Il y avait 40 hommes au château de Dunières ; 8 au fort de Sainte-Sigolène.
Le 15 avril 1592, plusieurs gentilshommes se réunirent au Puy pour établir une paix entre cette ville et de Chastes.L
Le 10 novembre 1593, le cardinal, duc François de Joyeuse, ne rendant à Rome pour solliciter l'absolution d'Henri IV qui venait de se convertir à la religion catholique  et, son frère, le duc Henri de Joyeuse (père Ange), qui venait de se mettre à la tête du parti de la Ligue, avec une suite d'environ 300 hommes, arrivèrent au Puy. Ils furent reçus par les Consuls en habit.
Le cardinal demeura un jour au Puy et partit pour Rome par Lyon.
Par contre, le duc demeura treize jours dans la maison du juge mage.
Il parlementa avec de Chastes, sénéchal, pour obtenir une trêve.
Cette trêve fut acceptée, de part et d'autre, mais d'après Arnaud, elle n'aboutit pas.
Le 27 décembre 1593, le roi promit une amnistie à ceux qui quitteraient le parti de la Ligue.
Au commencement de l'année 1594, Saint-Didier se soumit définitivement à Henri IV.
Toutefois, en 1594, le sénéchal de Chastes sentit la nécessité d'avoir, au-delà des Bois, quelques forces pour brider les Ligueurs. Il donna à Laurenson, de Saint-Didier, 180 écus pour réédifier les murailles de la cité.
Mais, en 1594, un nouveau conflit éclata au Puy entre royalistes et Ligueurs. Ces derniers attirèrent les royalistes dans un piège, à la porte Saint-Gilles, et en firent un véritable massacre. La noblesse vellave fut décimée. Chalencon de Polignac, de Chastes, Guillaume Saignard de Lafressange, de Chantemule, deux fils de Latour-Maubourg, de la Borye moururent en soutenant la cause royaliste contre les Ligueurs.
L'année suivante, en 1595, il se forma des compagnies appelées de Croquans, parce qu'elles ne se composaient que de villageois qui s'étaient donnés pour chefs, deux hommes du peuple, Billandon et Montagnac.
La noblesse royaliste, encore saignante de l'affreux massacre de la porte Saint-Gilles, n'entra pas dans cette alliance, mais elle se mit à recruter sur ses domaines des soldats pour cette armée.
Hector de la Tour-Maubourg, frère des deux victimes ; Hector de Fay de Verchières ; Jean de Chastes, surtout, couraient, frappaient à toutes les chaumières, donnaient des armes, des munitions et de l'argent à quiconque s'en voulait aller exterminer ces maudits et ces exécrables assassins, ainsi qu'ils les nommaient.
En quelques jours, 12 à 1.500 hommes, le plus grand nombre de Saint-Didier, de Dunières, de Sainte-Sigolène, se répandirent dans les mandements de Monistrol, de Roche-en-Régnier, de Tence, de Montfaucon, où ils saccagèrent, en juin 1595, les domaines des plus riches Ligueurs, notamment, le château des Dreux,
Le duc de Joyeuse exerça sur les habitants du Puy une véritable tyrannie.

Extrait de l’ouvrage, « D’Azur au Lion d’Argent » Tome II.
Paul Roni