jeudi 20 février 2020

Des italiens en Bretagne - Arpenteur de père en fils

  • Introduction
Le nom "COTTO" d'origine italienne se retrouve dans les registres de Plélan-le-Grand à partir des années 1600. 

4 frères ont fait souche en Bretagne : le marchand, l'arpenteur, le boucher et le laboureur.

Les Cotto sont encore et toujours présents en Bretagne
Francis Cotto, boucher-charcutier à Chartres de Bretagne (décédé en 1959) est le décendant de la branche marchande
D'autres Cotto sont toujours en Bretagne, à Plelan-le-Grand, à Douarnenez, à Rennes...

  • Arpenteur, de père en fils
Julien Cotto est le fils de Maistre Julien Cotto et de Janne Crambert,

En 1630, la foret de Brécelien appartenait en totalité au duc Charles de la Trémouille, pair de France, baron de Vitré.
En 1633, le duc de la Trémoille obtient l'autorisation de créer une forge au sein du plus grand massif forestier : le minerai de fer , l'ématie rouge est extraite proche du site choisi par la forge.
Le réseau hydrolique est aménagé entre les différents étangs (dont l'étang du Pont du Secret ) et les ruisseaux pour obtenir l'énergie nécessaire aux differents soufflets et marteaux.

De 1629 à 1642, le duc de la Trémouille, très endetté par sa vie de cours, vend sa forêt en lots, en 1653 la totalité de la foret est vendue à 25 gentils- hommes pour une somme totale de 197.260 livres ( Fonds de Montfort Arch.d'Ille-et-Vilaine, E134) avant d'émigré ruiné, en Allemagne en 1693. 

En 1653 Les forges qui se sont développées sont vendues à Jacques de Farcy et François d'Andigné après leur acquisition du fief de Brécilien (forêt de Brocélliande).

Le site industriel comprend un haut-fourneau et une affinerie de minerai en contrebas de la digue de l'étang fournissant l'énergie hydraulique nécessaire à la fabrication d'ustensiles agricoles et domestiques en fonte et en fer (tôles, marmites, poêles, clous, plaques de cheminées...). Le charbon de bois est obtenu dans la forêt proche auprès des nombreux charbonniers travaillant pour les forges.
Grâce au développement de certains progrès techniques la production augmente. Elle est alors de 500 tonnes de fonte et 360 tonnes de fer. Cette prospérité est due aux commandes pour la guerre d'indépendance des États-Unis d'Amérique.
Le site, outre la constructions de laminoirs à tôle s'enrichit de la construction du logis du Maître de forges et des habitations ouvrières. En 1796, près de 230 personnes y travaillent : jusqu'à 100 ouvriers sur place (métallurgistes, charretiers et ouvriers) et jusqu'à 130 en forêt ( bûcherons et charbonniers, mineurs, gardes forestiers).
L'affinerie des forges de Paimpont servira de modèle pour illustration dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert.
Les Cotto sont présents dans l'exploitation et l’administration des Forges.





Arpenteur:  Il est chargé de mesurer les terres avec de longues chaînes pour établir les limites des propriétées appartenants à des seigneurs. Aujourd'hui, c'est le géomètre qui est chargé cette tache pour des propriétaires (privés comme publiques) avec des instruments de haute technologie.

jeudi 13 février 2020

Les métiers que pratiquaient les Depras du XVIIIème au début du XXème sciècle

Être Fabricant

Malgré son titre le fabricant ne fabrique rien. 
Il se revendique « créateur ». C'est lui qui compose le dessin et choisit les coloris du ruban, qui fixe la qualité des fils. Il doit faire preuve de flair et d’intuition pour identifier les tendances de la mode.
Le fabricant et ses dessinateurs créent des dessins qui sont ensuite échantillonnés et déposés au Conseil des Prud'hommes pour être protégés des imitations.
La famille Depras et ses alliés forment un clan soudé par les intérêts économiques du milieu professionnel. 
Le milieu de la rubanerie est formé de clans familiaux très fermés. Les entreprises ne nécessitent pas de gros investissements en capital et les fabricants stéphanois attachés au « secret des affaires » préservent  jalousement le montant de leur engagement financier ( notamment vis-à-vis de l'administration et de leur propre syndicat ). Ce sont de individualistes, partisans du système libéral, rejetant les organisations syndicales qui commencent à revendiquer de meilleurs conditions de rémunérations. 
Cette mentalité entraînera la plus grande grève en 1900 et conduira aussi au déclin de cette « industrie » relativement peu structurée.


 Être Rubanier

Le métier de rubanier est auréolé d'une créativité qui lui confère un statut de métier d'art. Mais en revanche il est soumis aux aléas de la mode et aux risques économiques de la situation politique, notamment les guerres qui bloquent les exportations.
Fragilisé par ces différents facteurs, la profession connaît des périodes de prospérité et de déclin qui sont subies avec fatalisme.
En 1845, l’administration du Collège Royal de Saint-Étienne ouvre des cours techniques spécialisés.
En 1888, le musée de Saint-Étienne se transforme en Musée d'Art et d'Industrie qui donne une grande place à la création rubanière.
En 1889, une grande exposition des modèles et créations rubanières est organisée par
la Chambre de Commerce qui promeut l'industrie rubanière en participant aux grandes expositions.
En 1896, la législation sur les dessins et les modèles de ruban protège la création des fabricants qui déposent leurs dessins, esquisses et échantillons au Conseil des Prud'hommes et au Conservatoire des ARTS de la VILLE.





Rubanier est une évolution du métier de passementier. La différence entre les deux est que le passementier produit des travaux plus sophistiqués que le rubanier. Les deux métiers coexistent.




Le Passementier: tisse des galons, franges, rubans en fil, parfois gainés d’or ou d’argent,  destinés à la décoration de la maison ou des vêtements. Il utilise une douzaine de métiers (à ratières ou cames) ainsi que d’autres techniques comme le retordage et les finitions à l’aiguille.
3 années d'apprentissage, le maître ne peut pas avoir plus de 2 apprentis ;
La charge de maître entraîne des frais de représentation ( cadeaux, repas ) et une redevance pour subvenir aux besoins de la confrérie .

Jean-Pierre Depras, fondateur de la lignée des rubaniers à Saint-Didier-la-Séauve

1747 : la communauté des passementiers est la plus riche et malgré les aléas de la mode et de la politique, elle le restera jusqu'à la fin du 19ème siècle.



  • Jean-Pierre Depras : Quel parcours de vie

Jean-Pierre est placé en apprentissage chez un tisserand de Monistrol, ami et allié de la famille pour apprendre les techniques de tissage.

Après 4 années obligatoires d'apprentissage, il part à Saint-Didier-la-Séauve qui est de loin le plus important centre de fabrication pour les passements de luxe, et pour les tissus ornés d'or et d'argent.

Il est accueilli par une de ses tantes, Jeanne Pichon, mariée à André Brun, qui habite à Saint-Didier. Leur fils, André est passementier. 
Pendant plusieurs années, Jean-Pierre reste célibataire. Il va nouer des relations avec les passementiers qui sont en nombre important. Plus de la moité de la population active est investie dans la production rubanière. Cependant il n'y a pas de gros négociants à Saint-Didier.

Malgré les aléas de la Révolution, l'industrie du ruban a repris son activité dès 1790.

À 35 ans, Jean-Pierre épouse Catherine Bouthéon (25 ans) qui est rubanière. Son père est maître serrurier et la famille semble bien installée dans la ville. Tous les enfants Bouthéon sont passementiers .Tous les témoins du mariage de Jean-Pierre et Catherine sont passementiers dont Charles, frère de Catherine.

Ce mariage renforce l'intégration dans le milieu des rubaniers et des passementiers dans une période de fort développement de l'activité rubanière. 



JEAN-PIERRE Depras (1767-1835) mariage 7 floréal An 10 (27 avril 1802)
CATHERINE Bouthéon ou Boutéon( 1777-1816)

 LEURS ENFANTS
Jacques 
1805
Marguerite
1806
Eustache
1808
Marie
1809
Mathieu
1811
Marie Magdeleine
1813



Le premier Jacques est né en 1805 et le second Eustache est né en 1808,à Saint-Didier sous des auspices très favorables, ils ont pour témoins de naissance un noble local très estimé : Henry Saignard de La Fressange, et des notables tels Simon Grasset et Les Riou...
En 1816 à 39 ans, Catherine décède. Jean-Pierre reste seul avec ses 6 enfants qu'il va élever seul. Marie-Magdeleine, la plus jeune a 3 ans à la mort de sa mère.

Catherine laisse un petit héritage à son époux dont une maison et du mobilier pour une valeur de 1250 fr de l'époque, ce qui n'est pas négligeable.

La famille semble bien prospérer, dans une période de production intensive, grâce à l'invention du métier Jacquard (1828). 


  • Le développement économique régional
A Saint-Didier « aucun passementier ne s'établit fabricant à cause des difficultés de communication et l'inertie d'une riche bourgeoisie qui s'isolait ne songeant point à associer ses capitaux à un négoce qui devait apporter la richesse à Lyon et à Saint-Étienne » selon Chausse dans son livre la rubanerie de Saint-Didier.

La France est toute dévouée à Napoléon qui gagne toutes les batailles qu'il engage.

Saint-Étienne obtient en 1808 la création d'une Condition des Soies placée sous administration municipale, et échappe à la domination de Lyon.
Les spécialités apparaissent : veloutier, caoutchoutier... les hiérarchies professionnelles se développent : dans le centre urbain de Saint-Étienne le commerce est mené par le négociant et le commis de barre,tandis que le passementier reste localisé dans les communes de la Haute-Loire.


En 1834 alors que la Fabrique Lyonnaise amorce la délocalisation de sa fabrication dans les zones rurales , les passementiers stéphanois représentent déjà plus de 80 % des rubaniers de la région « lyonnaise 
L'activité rubanière offre à la ville le cadre économique (1/2 du chiffre d'affaires des industries stéphanoises. En 1846, les fabricants de rubans siègent au conseil municipal. Jusqu'à 40 000 personnes vivent de la passementerie.
Saint-Étienne va déposséder Lyon, l'éternelle rivale, du titre de première ville ouvrière de France.
Avant la crise des années 1880, on comptait près de 7 000 ouvriers-passementiers et 250 négociant-fabricants. Les ateliers urbains stéphanois privilégiés bénéficiant toujours en premier lieu des nouvelles mécaniques et des innovations techniques.


Jacques et Eustache vont quitter Saint-Didier pour s’installer à Saint-Étienne.

L'un, Jacques, sera veloutier et échantillonneur, l'autre, Eustache, sera passementier et ensuite négociant.

Quant aux filles Depras rubanières, elles épousent des rubaniers excepté Madeleine qui se marie avec un cordonnier.

Selon la légende familiale il y aurait eu un Depras consul ou préfet, nommé sous Napoléon. Mais à ce jour, aucune trace. 



  • Jacques le créateur, et Eustache le négociant partent consolider leur situation sociale à Saint-Étienne.

Eustache est très lié à son frère Jacques.  Ils habitent tous deux Faubourg de Lyon à Saint-Didier la Séauve, dans la maison parentale.

En 1835 à la mort de leur père un testament laisse à Eustache une maison avec jardin et un vivier à Saint-Didier, que laisse-t-il aux autres enfants ? On trouve des traces de cet héritage dans les tables de succession de la Haute-Loire.

En 1845, 10 ans après la mort du père, on retrouve Jacques installé à Saint-Étienne, où il exerce le métier de veloutier, nouvelle profession en pleine expansion.

En 1848, Eustache s'installe à son tour à Saint-Étienne, en tant que passementier.

Mais tandis que Jacques est domicilié rue du Breuil, dans le quartier du Montaud qui est un des quartiers où se situent les ateliers de fabrication, plus éloignés de centre-ville, Eustache choisit d’emblée le centre-ville ( actuellement rue Paul Bert ) où résident les négociants, appelés "fabricants".


L'immeuble de la rue Paul-Bert est resté propriété familiale jusqu'en 2018


Jacques est veloutier et échantillonneur. Autrement dit créateur de ruban de velours, qu'il sélectionne et échantillonne pour la vente.

Eustache, le passementier devient très vite un fabricant. Autrement dit un négociant.

Les destins de Jacques et Eustache présentent de grandes similitudes. Ils épousent les deux sœurs Limousin. Agathe qui est rubanière épouse Jacques en 1829 et Marie-Reine qui est couturière épouse Eustache en 1836.

Les Limousins sont rubaniers et passementiers.



Les enfants de Eustache et Marie-Reine
Marie Joséphine
1837
Antoine
1839


Jean-Pierre
Joseph
1841
Anne
1844
Jean-Pierre
1844
Joachim
1847
Jean-Marie
Victor
1848
Antoinette
1848
Marie
Benoite
1850
Marie-Louise
1857

 
Marie-Joséphine et Joachim sont morts quelques mois après leur naissance.

Des jumeaux : Jean-Pierre et Anne, nés en 1844, et à nouveau des jumeaux Jean-Marie Victor et Antoinette.
Seuls Antoine et Jean-Pierre Joseph ont des descendances identifiés.

Jean-Pierre Joseph, veloutier fait un mariage très modeste en épousant Louise Avignon qui est domestique, tandis qu'Antoine épouse la fille d'un passementier négociant place Jacquard.

Compte tenu des informations disponibles, la fabrique Depras fait partie des entreprises de taille moyenne qui s'est bien développée dans la fabrication du ruban velours qui est une nouveauté maîtrisée très tôt par Jacques.


localisation des Depras en haut à droite